- Mais qui êtes-vous, bon sang? Que me voulez-vous? Laissez-moi tranquille ou j'appelle la police!
Mes menaces n'eurent aucun effet. Le souffle s'intensifia et s'accéléra. J'avais l'impression terrible de le sentir sous ma nuque. Le souffle devint de plus en plus inquiétant et suffocant, mais aussi caverneux, comme si cette personne venait de pénétrer dans une cave. Le battement de mes tempes s'accéléra et m'étourdit presque, tant la pression se faisait plus forte. Je me sentis vaciller, ma tête tourner, mes yeux s'emporter. Ce souffle semblait dicter ma propre respiration et le battement de mon propre coeur et je ne résistai pas longtemps à une telle accumulation de stress.
Le seul réflexe que j'eus finalement fut de raccrocher le téléphone et de m'allonger sur le dos. J'essayai de calmer, de ralentir ma respiration, afin de recouvrer mes esprits et mon calme. Cela me prit de longues minutes avant de retrouver un apaisement nécessaire pour me replonger dans le sommeil. Je me retournai alors sur le côté, prêt à me rendormir, et c'est là que je L'ai vue, immense, évanescente mais clairement imposante. Une silhouette semblant mesurer près de trois mètres de haut se trouvait à mes côtés, me regardant de son regard vide et creux. Son souffle était identique à celui du téléphone, aussi lent et aussi intense. J'avais maintenant l'impression qu'il respirait directement dans ma boîte crânienne, ce qui eut le don de me rendre fou. La blancheur de ses dents éclairait la pièce bien plus intensément que ne le faisait la lune. Je ne voyais que cela, et cela me glaça d'effroi. Ses doigts squelettiques serraient une lame si fine et si pure qu'elle semblait être transparente. Elle ne bougeait toujours pas, restait impassible au pied de mon lit. La terreur me paralysait, et je fus bien incapable de faire le moindre mouvement. Mes yeux restaient rivés à ce regard inexistant et ce sourire qui n'en était pas un. Puis, d'un mouvement vif, il leva sa lame au-dessus de ma tête, la posture noble, et l'abattit finalement. Je sentais tous mes organes brûler de l'intérieur, comme si j'avais avalé une torche, mon cerveau semblait exploser en mille petits morceaux qui se projetaient contre les parois de mon crâne. Cette sensation dura de très longues minutes qui paraissaient une éternité, puis cette sensation s'arrêta en un néant sensoriel... Plus de son, plus de lumière, plus de sensation, j'étais et n'étais plus. Je n'étais plus qu'un concept abstrait, un alpha et un oméga, un plus et un moins, unis dans un seul être, une seule âme, une seule boule d'énergie faiblarde qui gravite autour d'un point inexistant...
Même si je ne suis plus la pour témoigner, je ne peux que vous donner ce conseil : si vous L'apercevez à votre tour, ne fuyez pas. Ne résistez pas. Ne cherchez même pas à dévier votre regard d'Elle. Votre seule chance de salut est qu'il n'y a aucun salut, aucune autre issue. Sa seule présence est le début de votre absence, la fin du tout et du rien...